Dans la rosée du matin
naquit un éphémère,
au moment ou une primevère
ouvrait sa corolle de satin.
Il savait que sa vie serait de courte durée;
aussi, avant de partir, il promit à la fleur,
qu'il reviendrait au bout de quelques heures,
pour lui raconter ce qu'il avait survolé.
A travers la campagne, son périple commença;
en survolant les champs et les bois,
partout dans la nature, la gaieté jaillissait;
tout était harmonie, sérénité, beauté.
Il arriva en vue d'une maison et y entra.
Là, des humains étaient réunis pour manger.
Ils avaient l'air gais et heureux;
au bout de la table, trônait un écran lumineux.
L'insecte s'approcha de l'écran et vit avec stupeur
d'autres humains se battre et s'entre-tuer
tandis que les autres continuaient de plaisanter.
Il en fut contrarié, et reprit sa route, songeur.
Il entra dans la ville avec entrain,
et s'engouffra dans un musée;
mais dans la salle d'art contemporain,
il fut pris d'une violente nausée.
Voici que précipitamment il en ressort
et malgré la pollution, reprend non sans effort,
sa progression vers une maison toute colorée;
c'était le magasin d'une fleuriste renommée.
Il se posa sur un seau où des fleurs papotaient;
elles lui apprirent qu'elles étaient des voyageuses en transit,
attendant de se faire acheter par des humains passionnés.
Mais le jour tombait, et il lui fallut repartir vite.
De ses dernières forces il revint vers la primevère,
et lui conta sa journée, sans rimes ni vers,
en évitant de parler trop des humains et de leurs moeurs,
mais en lui précisant toutefois qu'ils aimaient les fleurs.
Ensuite, il se lova sur ses pétales satinées
et il mourut heureux, l' âme en paix,
car le monde ne lui convenant guère,
il fut content de n'avoir été qu'un éphémère.